Traduction (approximative) du texte de Rosabianca Meschia
Avril 2006

Avec un Cobra dans le chapeau est un titre ironique et surréaliste pour une exposition dédiée à l’artiste belge, Jean Raine (Schaerbeek en Belgique 1927 – Rochetaillée-sur-Saône France 1986) qui, durant les années soixante-dix, avait présenté trois grandes expositions de son travail à la Galerie Il Salotto de Côme, témoignages d’un parcours graphique unique dans le milieu de l’avant-garde de la seconde après guerre mondiale.

Il fut peintre, écrivain, poète, cinéaste, activités qu’il initia alors qu’il n’avait pas vingt ans. Proche du dramaturge belge Michel de Ghelderode, d’André Thirifays, fondateur de la Cinémathèque de Belgique, et des surréalistes et en particulier de René Magritte qui voyait en lui un talent hors du commun digne d’estime et d’attention et qui ne manquait pas l’une de ses expositions. Ce furent des années où dans le pur style Dada il changea son vrai nom, Jean Philippe Robert Geenen, en Jean R.A.I.N.E. composé de lettres tirées d’un chapeau. Grâce à Magritte il entra en contact avec le groupe surréaliste français et à Paris où il suivait des cours de psychologie à la Sorbonne, et préparait une thèse sur le film abstrait, il connut Breton, Matta, Brauner, et le Dr Pierre Mabille" un maître et un père" avec lequel il réalisa en 1949 un de ses premiers films expérimentaux : "Le Test du Village".
Il fréquenta aussi les existentialistes Juliette Gréco, Michel de Ré, Malkine) travaille durant quinze ans avec Henri Langlois, directeur de la Cinémathèque française, connut Cocteau, Barsacq, Renée Moulard, Marcel Marceau et participa activement à la grande aventure du mouvement Cobra auprès de ses amis Dotremont, Alechinsky, Constant Jorn, Appel, Noiret, Havrenne. Il collabora en 1950 à la réalisation de l’unique film Cobra "Perséphone" et en 1951 organise à Liège, parallèlement à la grande exposition Cobra, "le festival du film expérimental et abstrait" au Palais des Beaux Arts.
Paradoxalement 1951 signe l’apothéose et la fin de Cobra, un mouvement de brève durée, mais qui a profondément marqué la nouvelle avant-garde qui lui succédera. Mouvement que Jean Raine à porté en solitaire avec son parcours graphique personnel. La peinture de Raine est une peinture baroque et fantastique qui évoque d’étranges fêtes et de somptueux "sucubi" ? (je n’ai pas de dictionnaire) qui naissent d’un geste fort, violent, athlétique dans les grands formats, une peinture "ebbra ?" de couleur, d’un magma de signes d’où affleurent des corps humains et animaux mêlés de guirlandes de fleurs, de forêts inviolées dans lesquels son monogramme J.R. devient une part intégrante. Chaque peinture est une lutte, comme si elle était l’ultime possibilité engagée avec soi-même, avec la société, avec la vie portée à l’exaspération aux limites de ses forces, aux limites de la vie, dans une sorte de danse rituelle autodestructrice et libératrice. Il peint "avec le coeur mis à nu", pour être au centre des choses, pour resurgir de la négativité de la vie, pour réveiller une alchimie de mécanismes aveugles et souterrains qui lui permettent d’ensorceller l’espace, obsessionnel et le remplir de ce qui réside en lui de plus dramatique et de plus lourd en "une sorte d’exorcisme d’angoisse" dans lequel se perdre mais qui en même temps cache une médiation entre l’homme damné et l’homme sauvé, entre l’homme guerrier et l’homme pacifique, entre la parole et le hurlement, entre la "smorfia" et le sourire... Car pour lui, "créer n’est pas un plaisir, c’est une nécessité profonde" en laquelle la vie se dissout en un rêve les yeux ouverts.